Mis à jour le 25 janvier 2022 • Écrit par Infocession

Témoignage cession d'entreprise :
Ne pas négliger la sécurisation et les due-diligence

Jean-Michel Carle

Repreneur puis cédant de Eurobio
Jean-Michel Carle - Eurobio
Secteur d'activité :
Produits pharma, médicaux & biotech
Chiffre d'affaires à la cession :
15 M€
Année de l'opération :
2017

Jean-Michel Carle reprend en 2010, avec son associé Denis Fortier, l’entreprise de biotechnologies Eurobio, spécialisée dans les réactifs pour recherche et diagnostic biomédical qu’il avait intégré quatre ans auparavant. Ils décident de vendre partiellement l’entreprise en 2017 tout en restant aux commandes du nouvel ensemble. 

Quel fut l’élément déclencheur de votre transmission ? 

Quand nous avons initialement racheté Eurobio, l’entreprise était à 7 M€ de chiffre d’affaires pour un effectif de 40 personnes. En 2016, c’est 17 M€ de chiffre d’affaires pour un effectif de seulement 50 personnes. Pour croître nous devions embaucher, mais nous ne trouvions pas les profils adéquats. Quand Diaxonit est venu vers nous, nous avons découvert une entreprise complémentaire à la nôtre, bénéficiant d’un service clients fort que nous n’étions pas parvenus à développer, tandis que nous disposions de l’agressivité commerciale. Nous n’avions par ailleurs que très peu de doublons au niveau des produits. Un rapprochement avait du sens au plan stratégique. 

Comment vous y êtes-vous préparé ?  

Nous n’avions que très peu de connaissances en matière de cession. Avec mon associé Denis, nous avons passé beaucoup de temps à chercher des informations sur les différents sujets liés aux transmissions, au plan fiscal notamment, car l’information centralisée n’existait pas. Nous nous sommes par la suite entourés de conseils. 

Il est primordial de réfléchir à son projet de cession bien en amont. Il faut préparer l’entreprise au changement.

Il faut anticiper les aspects fiscaux pour éviter des doubles impositions, notamment en cas de donation ou succession. 

Lorsque Diaxonit nous a approché nous n’avons pas fait appel à des conseils en fusions-acquisitions. Nous nous sommes principalement appuyés sur une avocate que nous connaissions déjà, et un fiscaliste pour les enjeux fiscaux et patrimoniaux. 

Comment s’est déroulée la transaction, et quels enseignements en avez-vous tiré ? 

Nous nous sommes mis d’accord sur un prix, lequel a été structuré pour un tiers en cash et deux tiers par échange d’actions. Le repreneur, Diaxonit, était une petite PME cotée en bourse. 

Nous nous sommes focalisés de manière peut-être excessive sur la valorisation de notre entreprise au détriment de la sécurisation de la transaction.

Peu de temps après la reprise, le cours de l’action de Diaxonhit s’est fortement dévalorisé à cause d’un krach boursier sur les petites entreprises cotées, et donc la valeur de nos titres échangés également. Ni nous, ni notre avocate ne l’avions vu venir. Nous avons également découvert par la suite que, Diaxonhit ayant émis des OCA (Obligations Convertibles en Actions) dont il restait quelques millions d’euros à convertir, dès qu’un détenteur décide de convertir en action il y a une dilution complémentaire pour nous. Avec du recul, nous aurions dû mener un audit à double sens pour disposer d’informations qui nous auraient permis de négocier autrement, et surtout de prévoir un mécanisme de relution pour éviter ces conséquences. 

Dans notre cas nous pouvons relativiser la situation, car nous sommes toujours dans l’entreprise et dirigeons le nouvel ensemble. Nous avons une vision de long terme et espérons faire progresser l’entreprise et son cours de bourse. Diaxonhit n’était pas au meilleur de sa forme lorsqu’ils nous ont repris, les actionnaires cherchaient de nouveaux dirigeants, et nous avions leur aval pour prendre la direction du nouvel ensemble dans le cadre de la transaction. 

Quelle a été la valeur ajoutée de vos conseils ? 

Notre avocate a été brillante et a fait preuve d’une grande diplomatie. Il faut trouver des conseils constructifs, qui soient méfiants mais pas dans le conflit perpétuel. Il est normal que vos conseils vous protègent, ils sont là pour ça, mais il faut que ce soit avec un esprit positif et constructif pour faire en sorte que le l’opération voit le jour. L’avocat fiscaliste est également très important pour ce type de transaction.

C’est cher, mais y avoir recours évite de commettre des erreurs et apporte des garanties.

Plus récemment, nous avons vécu une situation dans laquelle un fiscaliste n’avait pas vu l’un des impacts fiscaux d’une fusion de deux sociétés. Nous avons pu faire jouer son assurance pour être indemnisé d’une somme conséquente correspondant à l’impôt qu’il n’avait pas vu. Si nous avions fait l’opération seul, nous n’aurions que nos yeux pour pleurer !

Enfin, attention aux audits et aux due diligences, c’est très chronophage et ça peut être coûteux. Il est nécessaire de gérer son temps et d’avoir des équipes autonomes pour y faire face. Nous avions une data-room électronique en place, permettant à l’autre partie de récupérer directement l’information à analyser. 

Comment se passe la gestion du nouvel ensemble ? 

Dès notre arrivée dans ce nouvel ensemble nous avons effectué les changements nécessaires, gardé les meilleurs, réalisé de petites acquisitions et simplifié la structure. Nous sommes désormais 120. Nous avons conservé une vision à long terme, une organisation exceptionnelle, et disposons d’un historique qui emporte la confiance des tiers car nous avons toujours réalisé ou surpassé les objectifs de nos business plans.

Notre organisation autour de deux dirigeants nous a été bénéfique en tous points.

Nous devrions prendre exemple sur l’Allemagne où il est obligatoire d’avoir deux dirigeants pour démarrer une entreprise. Avec mon associé on a tout fait ensemble, on s’est beaucoup challengé, c’est ce qui a fait notre force pendant toutes ces années et encore maintenant. Ce n’est pas facile d’être deux, mais c’est encore plus compliqué d’être seul. 


CONSEILS CLÉS

  • Anticiper les problématiques fiscales en amont de la cession

  • Mener une Vendor Due Diligence pour sécuriser l'opération

  • S'entourer de conseils pour rester maître de la cession et en supporter le poids

  • Mettre en place une data room pour faciliter la réalisation d'audits de votre entreprise