Fils d’agriculteur, Pascal Trubert a créé Négo Transports avec son père à l’âge de 21 ans, une société de transport de matériel agricole, de transport pour le bâtiment, de transport industriel et de transport mobile homes et caravanes. Il décide en juillet 2017 de la transmettre à un industriel du secteur, le groupe MOUSSET, tout en conservant un poste de Directeur Général au sein de la nouvelle structure.
Quels furent les éléments déclencheurs de votre opération de cession ?
Lorsque j’ai créé Négo Transports avec mon père en 1981, nous n’avions alors que 3 véhicules. Nous avons développé la société au fil des années et diversifié les activités, de sorte qu’en 2017, au moment de la vente, elle présentait un parc de 60 véhicules et un effectif de 100 salariés. En 2015, à 55 ans, j’ai préféré anticiper ma retraite et m’y préparer suffisamment tôt.
Une cession se prévoit, ce n’est pas une opération que l’on envisage 6 mois avant.
Selon moi, l’échec de beaucoup de cessions s’explique par un manque de préparation en amont et à la précipitation que cela induit.
Comment vous-êtes-vous entouré pour réaliser cette cession ?
Pour le choix de la banque d’affaires, j’ai été épaulé par mon fils qui connaît bien le milieu. Nous avons rencontré quatre acteurs, et le courant est particulièrement bien passé avec l’un d’entre eux. C’est donc naturellement que nous avons choisi ce partenaire pour nous aider à trouver l’acquéreur idéal. Il est essentiel de bien s’entourer. Par exemple suite à un petit passage à vide, j’avais déjà tenté de transmettre Négo Transports en faisant appel à un de nos anciens banquiers. Ni lui ni nous n’étions préparés à réaliser ce type d’opération, et la tentative s’est donc soldée par un échec.
Quel a été l’apport de vos conseils tout au long de l’opération ?
Nos conseils ont réalisé un gros travail, qu’il s’agisse de la valorisation, du dossier de présentation, ou du ciblage et du choix des potentiels acquéreurs. Ils ont eu une très bonne appréhension de ce qu’est une entreprise familiale de campagne. Enfin, ils ont su nous laisser la maîtrise totale du dossier, tout en opérant dans l’ombre sur les aspects techniques pendant plus de quatre mois.
Certes, ces conseils ont un coût, mais quand on a à faire à des gens compétents, on ne le regrette pas.
Dans une opération de cession il y’a l’argent d’une part, et la réussite du projet de l’autre.
Quelles ont pu être les difficultés rencontrées au cours de cette opération ?
Même en anticipant la cession de son entreprise, il y’a beaucoup de choses auxquelles on n’est pas préparé. Par exemple, nous n’avions pas imaginé l’épaisseur des renseignements à fournir pour l’évaluation, le montage du dossier de présentation, ainsi qu’au cours de l’opération.
La gestion quotidienne de l’entreprise en parallèle de l’opération de cession a également été éprouvante.
Même très bien accompagné par mon expert-comptable et mon conseil juridique, cela a représenté une surcharge de travail considérable!
Et puis, il y’a également tous les nouveaux termes qui vous sont inconnus, les rapports de 150 pages qu’il vous faut lire en détail... Heureusement que mon fils était à mes côtés et que nous avons été bien conseillés dans cette affaire-là, ce qui fait qu’elle est allée à son terme.
Comment ont réagi vos collaborateurs et vos salariés à l’annonce de la cession de Négo Transports ?
Ils étaient inquiets. Ils craignaient que j’abandonne la société au bout de 6 mois alors que j’avais prévu un accompagnement long. C’est une crainte légitime quand une société de 100 personnes est reprise par un groupe de 1300 personnes.
Mais ils se sont aperçus des avantages que procurait cette opération : les salaires n’ont pas diminué (alors qu’ils étaient plus élevés que chez le repreneur !), nous avons mis en place l’intéressement...
Enfin, le courant avec le PDG du groupe MOUSSET est très bien passé. Ils ont été très surpris de pouvoir tutoyer le patron d’un groupe de 1300 personnes, mais ce dernier était lui-même ancien conducteur !
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur l’opération ?
Je suis très satisfait par le schéma pour lequel j’ai opté. L’intégration de mon fils dans l’entreprise et mon départ progressif ont pu rassurer les salariés. L’intégration au groupe MOUSSET nous a permis de réaliser de nombreux investissements, de doubler la taille de nos locaux, d’augmenter les effectifs et d’afficher des résultats bien supérieurs à ceux escomptés.
Le choix du repreneur est déterminant dans ce type d’opération. Il ne s’agit pas de vendre au plus offrant, c’est avant tout une affaire d’hommes avant d’être une affaire d’argent.
J’ai renoncé à une offre supérieure d’un million d’euros, au profit d’un partenaire qui partageait ma vision, ma stratégie, et mon humanisme. Enfin, bien-sûr qu’après 37 ans de vie passée seul aux commandes de mon entreprise, l’adaptation à cette nouvelle structure et cette transition n’est pas toujours évidente, mais pour le moment il n’y a pas beaucoup d’ombre au tableau.
Quels conseils donneriez-vous à un dirigeant qui souhaiterait transmettre son entreprise ?
Il est primordial d’anticiper. On ne prend pas décision de cession dans la précipitation, à l’emporte-pièce : La seule façon d’avoir des décisions réfléchies, c’est l’anticipation.
Ce qui m’amène à mon second conseil, qui consiste à essayer de vendre au meilleur moment possible, dans de bonnes dispositions financières pour l’entreprise, car c’est ce qui va conditionner le prix de cession.
Enfin, Il ne faut pas modifier son fonctionnement au cours des deux ans qui précèdent la vente, comme arrêter d’investir et réduire la voilure afin de faire des économies. Moi, je n’ai rien changé et on a continué de progresser sur la valorisation.
CONSEILS CLÉS
Préparer la cession le plus tôt possible
Garder une certaine stabilité dans le fonctionnement de l'entreprise les années qui précèdent sa transmission
S'entourer de conseils spécialistes des opérations de cession
S'assurer de la compatibilité de ses ambitions et de ses valeurs avec celles du repreneur